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Page:Bernardin de Saint-Pierre - Paul et Virginie, Didot, 1806.djvu/215

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PAUL

depuis le lever du soleil : j’eus beaucoup de peine à le déterminer à descendre, et à revoir sa famille. Je le ramenai cependant à son habitation ; et son premier mouvement, en revoyant madame de la Tour, fut de se plaindre amèrement qu’elle l’avoit trompé. Madame de la Tour nous dit que le vent s’étant levé vers les trois heures du matin, le vaisseau étant au moment d’appareiller, le gouverneur, suivi d’une partie de son état-major et du missionnaire, étoit venu chercher Virginie en palanquin ; et que, malgré ses propres raisons, ses larmes, et celles de Marguerite, tout le monde criant que c’étoit pour leur bien à tous, ils avoient emmené sa fille à demi-mourante. « Au moins, répondit Paul, si je lui avois fait mes adieux, je serois tranquille à présent. Je lui aurois dit : Virginie, si, pendant le temps que nous avons vécu ensemble, il m’est échappé quelque parole qui vous ait offensée, avant de me quitter pour jamais, dites-moi que vous me la pardonnez. Je lui aurois dit : Puisque je ne suis plus destiné à vous revoir, adieu, ma chere Virginie ! adieu ! Vivez loin de moi contente et heureuse » ! Et comme il vit que sa mere et madame de la Tour