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Page:Bernardin de Saint-Pierre - Paul et Virginie, Didot, 1806.djvu/249

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PAUL

sans contredit, la fonction la plus auguste dont le ciel puisse honorer un mortel sur la terre. Quel est l’homme qui ne se console de l’injustice ou du mépris de ceux qui disposent de la fortune, lorsqu’il pense que son ouvrage ira, de siecle en siecle et de nations en nations, servir de barriere à l’erreur et aux tyrans ; et que, du sein de l’obscurité où il a vécu, il jaillira une gloire qui effacera celle de la plupart des rois, dont les monuments périssent dans l’oubli, malgré les flatteurs qui les élevent et qui les vantent ?

paul.

« Ah ! je ne voudrois cette gloire que pour la répandre sur Virginie, et la rendre chere à l’univers. Mais vous qui avez tant de connoissances, dites-moi si nous nous marierons ? Je voudrois être savant, au moins pour connoître l’avenir.

le vieillard.

« Qui voudroit vivre, mon fils, s’il connoissoit l’avenir ? Un seul malheur prévu nous donne tant de vaines inquiétudes ! la vue d’un malheur certain empoisonneroit tous les jours qui le précéderoient. Il ne faut pas même trop approfondir ce qui nous environne ;