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Page:Bernardin de Saint-Pierre - Paul et Virginie, Didot, 1806.djvu/253

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PAUL

peuvent fixer l’affection de leurs épouses. Ils ont trompé étant jeunes ; on les trompe à leur tour étant vieux. C’est une des réactions de la justice universelle qui gouverne le monde. Un excès y balance toujours un autre excès. Ainsi la plupart des Européens passent leur vie dans ce double désordre, et ce désordre augmente dans une société à mesure que les richesses s’y accumulent sur un moindre nombre de têtes. L’état est semblable à un jardin, où les petits arbres ne peuvent venir s’il y en a de trop grands qui les ombragent ; mais il y a cette différence que la beauté d’un jardin peut résulter d’un petit nombre de grands arbres, et que la prospérité d’un état dépend toujours de la multitude et de l’égalité des sujets, et non pas d’un petit nombre de riches.

paul.

« Mais qu’est-il besoin d’être riche pour se marier ?

le vieillard.

« Afin de passer ses jours dans l’abondance sans rien faire.

paul.

« Et pourquoi ne pas travailler ? je travaille bien, moi.