Elle me dit : « Ô mon bon voisin ! il m’a semblé cette nuit voir Virginie vêtue de blanc, au milieu de bocages et de jardins délicieux. Elle m’a dit : Je jouis d’un bonheur digne d’envie. Ensuite elle s’est approchée de Paul d’un air riant, et l’a enlevé avec elle. Comme je m’efforçois de retenir mon fils, j’ai senti que je quittois moi-même la terre, et que je le suivois avec un plaisir inexprimable. Alors j’ai voulu dire adieu à mon amie ; aussitôt je l’ai vue qui nous suivoit avec Marie et Domingue. Mais ce que je trouve encore de plus étrange, c’est que madame de la Tour a fait cette même nuit un songe accompagné des mêmes circonstances. »
Je lui répondis : « Mon amie, je crois que rien n’arrive dans le monde sans la permission de Dieu. Les songes annoncent quelquefois la vérité. »
Madame de la Tour me fit le récit d’un songe tout-à-fait semblable qu’elle avoit eu cette même nuit. Je n’avois jamais remarqué dans ces deux dames aucun penchant à la superstition ; je fus donc frappé de la concordance de leur songe, et je ne doutai pas en moi-même qu’il ne vînt à se réaliser. Cette opinion, que la