Page:Bernier - Au large de l'écueil, 1912.djvu/203

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
201
au large de l’écueil

donnons au cœur !… Pourquoi seriez-vous impitoyable ? L’abbé Lavoie m’a pardonné, lui…

— Tu mens ! s’écrie le père, furieux.

— Oh ! quelle atroce parole, mon père, c’est votre tour à m’enfoncer un poignard !…

— Depuis que tu m’as caché ta honte, puis-je croire en toi ? L’abbé Lavoie ne peut t’avoir pardonné, lui moins que tout autre !… Il aime trop bien son Christ pour avoir sanctionné ton amour d’une fille de Renan !… L’apôtre a dû bondir sous l’outrage au Dieu qui a toute son âme et toute sa vie !… Tu ne lui as dit qu’une parcelle de la vérité !…

— Il faut que vous me croyiez, mon père, que vous regrettiez cette parole qui me torture, et la voix du jeune homme a une telle énergie que le père en est profondément remué. Je ne vous garde pas rancune de me flageller du nom de menteur, vous vous croyez le justicier de la race et de la foi… Mais entendez-moi bien, et il vous le dira lui-même, j’ai fait à l’abbé, le jour du poll, en un moment de souffrance aiguë, la narration que vous entendîtes… Je me préparais à sa colère, et voici ce qu’il me dit : « Tu ne fus