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au large de l’écueil

jalousement leurs droits que nous défendons les nôtres, et ce jour-là, mon père, l’âme canadienne prendra son essor triomphal… À l’heure actuelle, elle frémit dans notre vie nationale, elle s’épure, encore incertaine, emprisonnée dans la gangue des rancunes et des méfiances… Mais la liberté britannique est là qui travaille : elle a fait de grandes choses, elle fera celle-là, dégagera de ses langes l’âme canadienne… Sous son égide, les deux races vont se respecter, s’aimer, autonomes, entières, fraternelles, par-delà les passions, les haines, les jalousies, les mauvais souvenirs… On l’enseignera dans les foyers, dans les écoles, on l’écrira dans les lois !… Ce sera l’amour du pays dans l’autonomie des races, chacune d’elles étant fière de la liberté morale, du génie, du développement de l’autre dans la contribution de chacune à la prospérité, à l’immortalité de la patrie canadienne ! »

Jamais, dans leurs discussions amicales d’auparavant, Jules et Augustin n’avaient eu une vigueur telle, une telle clarté. Les deux femmes, bien que souvent témoins de la marge d’opinion entre le père et le fils, se sentirent en présence de convictions mûries, plus ardentes, plus