Page:Bernier - Au large de l'écueil, 1912.djvu/70

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
68
au large de l’écueil

large et baignant dans la chaleur de l’après-midi morne, aux yeux de Marguerite et Jules, bercés par la voiture. La double rangée d’arbres s’allonge au loin : un frisson agite mollement les feuilles assoupies. Le cheval oblique à droite : il renifle maintenant la poussière brûlante de l’allée transversale. Dans les carrés verts, les balles du tennis affolent les robes blanches. Le jardinier, courbé sur les plate-bandes, assouvit la soif des fleurs. Le Parlement est lourd de sommeil. Les deux jeunes gens abandonnent le cocher à la somnolence qui le gagne. Ils gravissent déjà la pente rapide qui conduit à la porte d’honneur. Il fait bon entendre le murmure des gerbes d’eau fraîche égouttant leurs perles dans la fontaine ronde.

— Que c’est beau, votre Québec ! s’écrie Marguerite. Je comprends que vous en soyez fou !…

— Je le trouve plus beau que jamais, Mademoiselle, fit-il, un peu songeur.

— Hier soir, au Château Frontenac, assise à la fenêtre de ma chambre qui regardait le Saint-Laurent rouge de flammes, j’ai reçu le coup de foudre… Décidément, je suis amoureuse !…