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au large de l’écueil

— Je vous demande pardon, je ne voulais pas être cruel, murmure-t-il…

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La calèche roule sur l’avenue des Érables. Les branches lourdes plient et se tordent sous le vent plus fort. Les oiseaux, affolés d’air et de lumière, joignent leur note en un chœur étincelant. Sur une pelouse soignée, des bambins se poursuivent avec des éclats de rire. Enfouies mollement dans les bergères d’osier, les femmes offrent leur joli visage à la brise. Elle leur apporte l’arôme des foins coupés dans les prairies de Sainte-Foye. Le cocher revient à la réalité des choses, et ses yeux verts pétillent sous les sourcils en broussailles. La tristesse est encore au cœur de Jules et de son amie. Ils savent, dès lors, que plus l’abîme entre eux s’élargit, plus la peine qu’ils en ont les grise et les attache l’un à l’autre. Par une ouverture béante, à gauche de l’avenue, le soleil décoche un rayonnement qui les aveugle. D’un geste rapide, ils protègent leurs yeux, et leurs regards se rencontrent, se gardent, se déprennent à regret pour demeurer aux profondeurs atteintes. Apercevant, sur un balcon où le lierre grimpe aux colonnes minces,