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au large de l’écueil

nada grandisse et qu’il étende ses ailes afin de planer d’un vol plus haut dans l’histoire ! s’écrie Jules, s’animant de plus en plus. Je ne sais quelle passion cet endroit m’inspire… J’entrevois l’âme canadienne à travers une vision nouvelle : elle est extraordinaire, grandiose, émouvante… Elle a la profondeur et la largeur du Saint-Laurent, la hauteur des Rocheuses, la puissance de Niagara et de Montmorency, l’harmonie des forêts épaisses, le souffle des plaines de l’Ouest, la clarté de la Baie des Chaleurs, le génie de deux races géniales, la poésie des Laurentides et l’immortalité de la Croix de ce monastère !…

Et la jeune fille qui l’écoute est désormais certaine que ce Canadien lui est infiniment cher…

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La calèche roule sur le pavé dur qui vibre. À la Porte Saint-Jean, où la foule est dense, un fluide irrésistible de joie remplit l’atmosphère. Tous ont secoué la torpeur du jour. On dirait que toutes les femmes sont belles dans les corsages clairs et sous les chapeaux fragiles. Jeunes gens et jeunes filles échangent des œillades chaudes. Un mendiant tire un air boiteux d’un