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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

lui-ci : devant ce regard triomphal, il prévoit l’insuccès. N’est-il pas facile d’esquiver ?

— Je t’admire, tu as un bon cœur, mon Jean ! dit-il, un peu gêné cependant.

— Admirer n’est pas toujours admettre.

— Donne-moi le temps de mûrir tout cela !

— C’est juste et je vous en suis profondément reconnaissant, mon père ! dit le jeune homme, attristé par l’accent figé, le sourire trop finaud de Gaspard.

— Je ne suis pas l’homme à me jeter en aveugle dans une entreprise, n’est-ce pas ?

— Et moi qui espérais t’émouvoir ! La chose me paraît si impérieuse et simple : il faut que notre race veille et se défende contre elle-même… Les races fières d’elles-mêmes seules ont le droit de vivre !… Nous sommes nous-mêmes : le serons-nous toujours ? À doses subtiles, le génie anglais s’infiltre… les Anglais ne crient pas, ils ne se vantent pas, ils sourient à nos querelles, à nos haines, à notre destruction les uns par les autres. Sûrs d’eux-mêmes, ils attendent… Si notre indolence continue, nous sommes perdus. Je ne vois de salut qu’en la renaissance de l’orgueil national et qu’en sa vitalité ! Orgueil de nos traditions, orgueil de notre histoire, orgueil de notre survivance, orgueil de notre mission canadienne !… Je n’ai pas de haine contre les Anglais, je les