Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/541

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Nul n’attaignit jamais jusqu’à telle hauteur
Quoy qu’un publique bruit ny trompé, ny vanteur,
Ait acquis à son nom la fleurissante gloire
De prince liberal et d’illustre memoire.
Et nous ne ferons pas voller par l’univers
Un los si merité sur l’aille de nos vers ?
Et nous ne dirons pas que sa main renommée
Sçait aussi dignement, quand elle est desarmée,
Obliger de bien-faits ceux qui luy sont soubmis,
Qu’elle sçait aux combats vaincre ses ennemis ?
S’en taise qui voudra : s’abstienne de l’escrire
Quiconque ne sent point ceste bonté luy rire,
Soit par le seul effet de son propre mal-heur,
Soit par celuy qui naist d’ignorer sa valeur :
Moy qui marche entre ceux que la source feconde
De ce grand fleuve d’or laisse boire en son onde,
Je le veux publier, tant parlant qu’escrivant,
Aux oreilles du siecle et present et suyvant :
Et dire sans flatter que les vœux dont la France
Accompagne le vol de sa neuve esperance,
Ne doivent aspirer à rien de plus heureux,
Si non qu’en ceste part de prince genereux,
Aussi bien qu’és vertus qu’encor on en espere,
Le ciel nous rende un jour le fils égal au pere :
Luy faisant tellement ses bien-faits ordonner,
Qu’il donne comme un roy qui veut long-temps donner,
Mais qu’une telle ardeur à ceste gloire enflame,
Qu’il donne tousjours moins de la main que de l’ame.
Face l’heureuse loy qui commande aux destins,
Que s’estans assoupis les troubles intestins
Dont nous avons senty la tourmente publique,
Il vieillisse en un regne à jamais pacifique ;
Et n’esprouve en nul temps ce que pese un harnois,
Fors qu’en une barriere ou durant des tournois,
Ou lors qu’un sainct courroux époindra son courage
D’aller reconquerir son antique heritage :