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Page:Berteval-Le theatre d'Ibsen, 1912.djvu/303

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LE PETIT EYOLF


liberté de la nature. Et il est rentré chez lui un jour d’inspiration, exalté, mais non transformé, et incapable déjà de réaliser ce qu’il avait entrevu.

C’est à ce moment que la pièce commence. Plein de ses nouvelles pensées, Allmers veut se mettre immédiatement à refaire l’éducation d’Eyolf. Il l’envoie jouer ; mais l’enfant est impropre au jeu à cause de sa béquille, mais Rita, à laquelle il veut faire part de ses projets, l’importune des témoignages de son amour. Froissé par sa femme, il reporte son affection sur Asta. Toute son équivoque amitié d’antan lui revient au cœur ; au moment où il veut suivre la nature, il est plus que jamais à côté d’elle, et la meilleure pensée de ce cérébral a exaspéré tous ses mauvais sentiments. Sur les fjœlls, dans l’air pur et la solitude, il n’a fait qu’un rêve, il n’a pas retrouvé l’équilibre de son être ; et au petit Eyolf, dont il voulait faire un homme, il n’apporte que l’exemple d’un père désemparé, et le vide d’une nouvelle formule pédagogique.

Seule Rita, dans son instinct de femme amoureuse, ne s’y est pas trompée. Toi non plus, lui dit-elle, tu n’as jamais aimé Eyolf, à vrai dire.


Rita (avec un regard ironique). — Nous deux ? Toi non plus, tu ne l’as jamais aimé, à vrai dire.

Allmers (saisi, la regardant). Moi, je n’aurais pas ?…

Rita. — Non. D’abord, tu étais absorbé par ce livre… sur la responsabilité.

Allmers (avec force). — Oui, je l’étais. i’lais souv.ienstoi que ce livre, je l’ai sacrifié à Eyolf.

Rita. — Va, ce n’est pas pour l’amour d’Eyolf que tu l’as abandonné.