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Page:Berthelot - Discours de réception, 1901.djvu/34

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particulièrement précieux sous l’Empire, à une époque où l’esprit d’indépendance était mal vu et même persécuté, après le coup d’État et la tentative criminelle d’Orsini. Aussi la jeunesse était-elle heureuse de se retrouver dans un milieu plus libre, en dehors de la compression officielle ; je dirai mieux, en dehors de ces conventions académiques, susceptibles d’entretenir une certaine gêne dans les relations, en raison des arrière-pensées que chacun soupçonne.

Cette gêne n’existait pas dans le salon de Bertrand ; on y parlait librement des hommes et des choses. Les maîtres de la maison mettaient chacun à l’aise, par leur franchise dépourvue d’artifice et leurs dispositions amicales et serviables. Je ne prétends pas qu’on n’y parlât jamais de candidatures académiques, personne ne me croirait. Mais cela se faisait avec toute discrétion et sans qu’on risquât de se heurter à ces hostilités sourdes et à cet esprit de dénigrement, qu’engendrent les rivalités personnelles et les luttes de longue haleine dans un milieu limité. Au contraire, nul plus que Bertrand n’était opposé aux petites combinaisons d’intérêt et de vanité, trop fréquentes dans les Académies, où on se ligue parfois pour écarter ou retarder les hommes supérieurs. Bertrand a rappelé à cet égard des