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j’étais allé à Montréal avec ma fille Madame de Bouctouche pour assister à la célébration de la grande St-Jean-Baptiste. La comtesse fut très impressionnée par la grandeur de la démonstration. Quelques mois plus tard elle me rendait grand-père d’un petit-fils que j’avais longtemps demandé au ciel. Ce petit-fils c’est le vicomte de Bouctouche. Il porte sur son corps une marque à laquelle il pourra toujours être reconnu. Il a sur la fesse gauche l’empreinte bien dessiné d’un castor rongeant une feuille d’érable. Au-dessus du castor, tu pourras lire en lettres très distinctes les mots : « Travail et concorde ».

Maintenant, mon cher ami, avec ces données, tu peux empêcher toute substitution d’enfant advenant la mort du vicomte, qui, je crois, ne jouit pas d’une très forte santé.

Tout à toi,
CALIX DE ST-SIMON.

Caraquette, après la lecture de cette lettre, resta rêveur pendant quelques minutes.

Il s’agenouilla devant une de ses malles et en fit jouer la serrure à secret.

Cette malle contenait une vingtaine de boîtes en ferblanc. Chacune de ces boîtes renfermait des valeurs monétaires ou des obligations pour un montant considérable.

Caraquette mit dans son portefeuille une liasse de billets de banques et sortit de l’hôtel.

Il se rendit chez un perruquier de la rue Notre-Dame. Lorsqu’il reparut sur la rue il était méconnaissable. Caraquette portait une barbe roussâtre qui lui couvrait la moitié de la figure. Son chapeau de castor gris avait été remplacé par un feutre mou bossé comme le chapeau d’un bommeur ou d’une maquignon américain.

Il recommença sa promenade sur la rue St-Denis, près de la maison du comte de Bouctouche.

Il vit la voiture de louage s’arrêter devant la résidence du comte et, plus tard, caché en arrière de la boîte d’un arbre, il put assister au départ de la famille.

Une vingtaine de minutes après Caraquette avait loué un dog-cart et se lançait à la poursuite des fugitifs.

Rendu à Ste-Thérèse, Caraquette afin de ne pas exciter les soupçons du comte de Bouctouche, avait changé son dog-cart pour un bogboard.

Il avait soin de ne pas s’approcher de trop près de la voiture du comte.