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Caraquette dissimula son émotion et sut délier la langue de Cléophas en lui payant une bouteille de champagne.

Cléophas parla, mais il se garda bien de dévoiler le secret du tatouage du petit Pite et de son entrée au collège.

Caraquette avec l’esprit de perception rapide qui le caractérisait, comprit qu’il y avait quelque anguille sous roche, et il essaya vainement de faire parler Cléophas sur le but du voyage de Bouctouche à Ste-Thérèse.

Après avoir causé pendant une heure avec l’homme au chapeau de castor gris, Cléophas alluma un cigare de dix cents et sortit de l’hôtel pour se rendre chez la comtesse de Bouctouche.


XI

SCÈNE D’AMOUR.


La première pensée de Bénoni en sortant de prison fut pour Ursule.

Il alla trouver un des commis dans le département des chemins et obtint de l’emploi comme conducteur d’un des arrosoirs de la corporation sur la rue Notre-Dame.

Il ne garda pas sa place bien longtemps, car il fut déchargé le soir même pour avoir déchiré le bout de hose avec lequel il chargeait d’eau son chariot à la plug au coin de la « Minerve ».

L’accident avait été causé par l’intensité de la flamme dont il brûlait pour Ursule.

Pendant que son chariot s’emplissait, sa pensée était transportée à St-Jérôme. Dans sa rêverie amoureuse il fit avancer son cheval en oubliant de décrocher la hose qui était attachée à la plug. La conséquence fut que le tuyau se brisa.

Bénoni avait reçu trois chelins pour sa journée de travail.

Il se rappela que M. Caraquette avait besoin de lui à St-Jérôme.

Avec trois chelins il ne pouvait pas payer son ticket sur le chemin de fer. Pour faire le voyage gratis il se faufila dans un box car et se rendit à sa destination sans encombre. En débarquant à St-Jérôme un des brakesman du train essaya de lui faire un mauvais parti, mais il le mit à la raison en lui appliquant une gnole sur le fouillon.

Bénoni n’avait pas les moyens de faire de grosses dépenses et il crut que le meilleur parti à prendre était de se rendre immédiatement chez le comte de Bouctouche.