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ximénès

— En attendant, si les choses continuent à aller de la sorte, dit Mota, le royaume deviendra inhabitable. Voici que l’Archevêque parle maintenant de faire faire une enquête sur le Chapitre, afin de le dissoudre s’il y a lieu, et de le rétablir suivant les anciennes règles. Quant à moi, plutôt que de laisser toucher à mes privilèges, je m’attacherai à la fortune de l’archiduc Philippe et je le suivrai jusque dans les Flandres. »

Les moines se regardèrent étonnés. Mota était une des créatures de Ximénès qui, reconnaissant en lui une intelligence peu ordinaire et une profonde science théologique, l’avait, de simple prédicateur qu’il était, élevé tout à coup au canonicat.

Cependant Barracalde allait commenter, en l’approuvant, le discours de Mota quand le père Ruys, descendant de chez Ximénès, entra à son tour dans la salle.

Il enveloppa les interlocuteurs de son regard clairvoyant, puis, d’une voix brève :

« Sa Seigneurie Illustrissime vous fait dire à tous, mes révérends pères, de vous trouver demain à la cathédrale, sitôt que le crieur aura annoncé les douze coups de midi. On sortira processionnellement à la rencontre de l’archiduc Philippe et de la princesse Jeanne, qui doivent coucher cette nuit à Aranjuez et arriver demain à Tolède. »

Le déploiement des pompes catholiques ne laissait jamais aucun Espagnol indifférent, qu’il fût Castillan, Aragonais ou même Asturien. Aussi l’annonce qu’en venait de faire le père Ruys calma-t-elle pour un instant les colères accumulées dans l’âme des moi-