Page:Bertrand - D’Alembert, 1889.djvu/129

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toujours le fouet à la main, promet des coups plus rudes encore.

« J’enverrai prochainement à frère Gabriel, dit-il (Gabriel est le libraire Cramer), de quoi les faire brailler encore, car pendant qu’ils sont en train de braire il n’y a pas de mal à leur tenir la bouche ouverte. J’ai commencé par les croquignoles, je continuerai par des coups de houssine ; ensuite viendront les coups de gaule, et je finirai par les coups de bâton. »

Il rêve mieux que le bâton et ajoute : « Mon Dieu ! l’odieuse et plate canaille ! mais elle n’a pas longtemps à vivre et je ne lui épargnerai pas les coups de stylet ! » La houssine, le bâton, le stylet, c’est toujours la même plume, diversement taillée, et l’apparente férocité de d’Alembert n’est au fond qu’un petit accès de vanité. D’Alembert rit et s’amuse, il ne veut poignarder personne. Il varie ses plaisanteries.

« S’ils avalent ce crapaud, dit-il dans une autre lettre, je leur servirai d’une couleuvre, elle est toute prête. Je ferai seulement la sauce plus ou moins piquante selon que je les verrai plus ou moins en appétit. Je respecterai toujours, comme de raison, la religion, le gouvernement et même les ministres, mais je ne ferai pas de quartier à toutes les autres sottises et assurément j’aurai de quoi parler. »

Voltaire devait être content cette fois : ce n’est pas là style de notaire. D’Alembert aussi était content de lui-même, Voltaire lui écrivait :