Page:Bertrand - D’Alembert, 1889.djvu/174

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abandonner avec moi une patrie dont ils ne sont pas mieux traités.

« Pourquoi faut-il, madame, que la distance immense où je suis des États que Votre Majesté Impériale gouverne avec tant de sagesse et de gloire, ne me permette pas d’aller moi-même la supplier d’approuver ces raisons, mettre à ses pieds (au nom de tous les gens de lettres et de tous les sages de l’Europe) mon admiration, ma reconnaissance et mon profond respect, et l’assurer surtout que ce n’est point un principe de vanité raffinée qui me détourne de ce qu’elle désire ; la vanité du philosophe peut refuser tout à la supériorité du rang, mais elle entend trop bien ses intérêts pour ne pas se dévouer à la supériorité des lumières, en s’attachant, comme elle le souhaiterait, à Votre Majesté Impériale, si les motifs les plus puissants et les plus respectables ne s’y opposaient. Je conserverai précieusement toute ma vie la glorieuse marque que Votre Majesté Impériale vient de me donner de ses bontés et de son estime, mais l’honneur qu’elle me fait est si grand, il suffit tellement à mon bonheur que je ne songerai pas même à m’en glorifier. »


Soltikof, ambassadeur de Russie à Paris, fut chargé d’offrir à d’Alembert une pension de cent mille francs sans ébranler la résolution du philosophe.


« Votre Majesté Impériale, depuis la lettre qu’elle m’a fait l’honneur de m’écrire, vient encore de mettre