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Page:Bertrand - Gaspard de la nuit, éd. Asselineau, 1868.djvu/20

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dans le butin de Charles-le-Téméraire. » C’est bien - cela : ce qui importe aujourd’hui et à distance, c’est le faire, c’est la volonté, ou la fantaisie de l’ouvrier, et plus encore le génie qui le guidait dans le choix des éléments et dans leur mise en œuvre. J’y vois toujours l’horreur des vieilles conventions, du rebattu, du médiocre, comme le dit justement l’illustre biographe, l’horreur du portique tragique de M. de Jouy et du salon de M. Etienne. Ce que d’autres, plus impétueux et plus larges d’ailes, allaient chercher au loin, dans des pays désappris, à Madrid, à Florence et dans les burgs des bords du Rhin, plus loin même encore, au-delà de l’Euphrate et du Caucase, Bertrand le cherchait, non pas à ses pieds, mais à la hauteur de ses yeux, sur les places et dans les rues de son Dijon bien-aimé. Des aspects nouveaux le séduisaient, et sa sensibilité, je parle au sens des chimistes, lui faisait trouver moyen de rendre visible aux autres ce qui était lucide pour lui-même. « Son rôle, avons-nous dit ailleurs, a été, après les Remi Belleau, les La Fontaine, après La Bruyère et PaulLouis Courier, de démontrer la puissance du mot et de ses combinaisons, et de faire voir tout ce que cette langue française que, sur la foi du xvine siècle, on s’obstine à considérer comme la langue abstraite du raisonnement et de la discussion philosophique, peut acquérir, entre des mains habiles, de relief, de couleur, de nombre et de sonorité. Il semble qu’il