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Page:Bertrand - L'appel du sol, 1916.djvu/166

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L’APPEL DU SOL

Un percutant, explosant au milieu d’une escouade qui se tenait au bord d’une allée forestière, avait fauché un orme et trois pruniers sauvages, tué cinq hommes, les enterrant dans l’immense entonnoir qu’il avait creusé, aspergeant la tombe d’une averse dorée de petites prunes mûres.

Le capitaine de Quéré courut vers la fosse ouverte. La terre remuée dans ses profondeurs se tachait d’une nappe de sang. Il leva les yeux vers le ciel où s’épanouissait la lumière, comme pour le prendre à témoin du sacrifice de ces enfants. Il se signa. Après une seconde de méditation, semblant répondre aux paroles du prêtre invisible, qui absolvait ces martyrs, humble servant ainsi qu’en son enfance et tout pénétré de son sacerdoce, il murmura :

Et lux perpetua luceat eis !

Il se hâta de rejoindre Lucien qui observait devant lui la chute des engins de l’ennemi et tâchait de reconnaître ses mouvements.

Après l’orée du bois, il y avait un terrain nu à franchir qui s’infléchissait d’une pente de plus en plus rapide vers un ruisseau. Pour descendre, on pouvait se défiler : il y avait des