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Page:Bertrand - L'appel du sol, 1916.djvu/256

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L’APPEL DU SOL

qu’il ne passe point et pour qu’à votre abri l’enchaînement de nos habitudes se perpétue. Votre fonction est celle de ces cyprès de notre plaine du Rhône : ils se pressent le long des routes et des champs, protégeant du mistral le passage régulier des diligences et la croissance des épis. Ne songez point aux faiblesses individuelles que vous m’avez citées ; c’est un peu de boue qui s’épure dans l’immensité sainte des mers. Comprenez que ce qui vous a paru de l’indifférence ici, était la sage volonté de cette terre de jouer son rôle, lequel est de s’épanouir comme par le passé. Elle souffre des autres lambeaux du territoire piétinés par les armées en marche, éventrés par les terrassiers ennemis. Elle ne s’en développe pas moins dans la lumière. Chacun sa part. Ce n’est point parce que votre bras était blessé que vos poumons ou votre cœur ne devaient plus remplir leurs fonctions normales. Je vous dis qu’il y a une inspiration de la terre qui sait quel est son lot. Partez, mon jeune et cher ami, avec plus de courage et plus de confiance, parce que, malgré l’ouragan, notre amie madame Courtois garde son sourire et sa gorge nue, et parce que