Page:Bertrand - La Femme qui était retournée en Afrique, 1920.djvu/68

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Augustin était frappé d’une telle stupeur, qu’il ne proféra pas un cri. Un silence accablant tombait sur tous ceux qui étaient là & qui semblaient ne pouvoir en soulever le poids. Adéodat lui-même hésitait à reconnaître sa mère sous ces vêtements de pauvresse. Froide & presque hostile, elle détourna son regard de celui d’Augustin &, marchant vers Priscilla & le médecin qui lui masquaient le lit, elle dit, d’un ton mal assuré, qu’elle voulait voir l’enfant. Elle s’exprimait en punique, ne sachant plus le latin, & sa voix, habituée maintenant aux dures syllabes africaines, avait des inflexions rauques, comme celle des esclaves & des gens du peuple. Mais cette langue, c’était celle des cantilènes dont elle avait bercé le sommeil de son fils. En l’entendant, le moribond ne douta plus.