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le débutant

faiblir, voir la souffrance d’un pauvre amoureux que j’aurais encouragé.

L’essayage était terminé.

La couturière partie, Paul Mirot quitta sa cachette et s’élança vers Simone, qui, dans le désordre de sa toilette, pour cacher sa confusion, se jeta dans ses bras, implorante :

— Va-t-en ! Va-t-en !

Si tu me chasses, je vais me noyer, comme Baptiste !

— Oh ! mon chéri, je ne veux pas que tu meures.

— Quand on allume l’incendie, il faut l’éteindre.

— Mais, tu as entendu, tu sais donc tout ?

— Hélas ! non. J’ignore l’amour qui fait homme.

— Bien vrai ? Ah ! que je suis contente ! que je suis heureuse !

Cet aveu mettait le comble au ravissement de cette femme. Il lui semblait que son aimé était plus à elle, tout à elle, comme cela. Et dans un élan de tendresse débordante et de passion longtemps contenue, Simone fut l’initiatrice.

Le lendemain, quand le jeune homme s’éveilla, il faisait grand jour, et il fut tout surpris de ne pas reconnaître sa chambre solitaire de la rue Dorchester. Il ne fut pas long, du reste, à se souvenir, et près de lui, il avait la preuve vivante qu’il n’avait pas dormi dans la solitude.

Il était l’heure, maintenant, de se rendre au Populiste, et il se présentait une difficulté que les amoureux n’avaient pas prévue la veille : comment sortir de cette maison dans la matinée, sans s’exposer à quelque rencontre importune ? Dehors, il faisait une tempête effroyable. Le vent du nord soulevait des tourbillons de neige, qui empêchaient de voir à dix pas devant soi. Paul s’approcha de la fenêtre et aperçut

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