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Page:Bessette - Le débutant, 1914.djvu/142

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le débutant

amena à différentes reprises la conversation sur le sujet. Mais invariablement elle lui répondit :

— Non, mon chéri, ce serait une folie que tu regretterais plus tard, et je t’aime trop pour te mettre au pied ce boulet de l’union indissoluble, qui entraverait ta marche vers l’avenir. Je t’en ai expliqué les raisons avant de me donner à toi, ces raisons subsistent toujours puisque, au lieu de rajeunir, je vieillis. Et peut-être que si nous nous sentions enchaînés l’un à l’autre, nous ne nous aimerions plus du tout. Le titre de mari, que je te donnerais, me ferait penser à l’autre. Et toi, avec ton caractère ennemi de toute contrainte, de te savoir obligé de me rester fidèle, ne songerais-tu pas à me tromper ?

C’est en vain qu’il insistait.

À l’automne, un mois après l’ouverture de la saison des spectacles, le Théâtre Moderne fit faillite, ne pouvant résister à la guerre sournoise que l’on continua à lui faire après la violente campagne de presse dont ce théâtre avait été l’objet la saison précédente. Ce fut le premier coup sérieux porté par le parti réactionnaire, organisé en nombreuses congrégations, sociétés soi-disant patriotiques, associations de jeunes gens, à ceux qui se dévouaient pour éclairer le peuple afin de le libérer d’onéreuses servitudes.

On s’appliquait surtout à chauffer à blanc le fanatisme inconscient des jeunes gens enrôlés dans l’Association des Paladins de la Province de Québec, à tel point que bon nombre d’entre eux devenaient des espèces d’illuminés, quelques-uns même, des fous dangereux. Un jour, trois ou quatre Paladins osèrent insulter mademoiselle Louise Franjeu, la dévouée collaboratrice du Flambeau, qui revenait de donner son cours à McGill. Heureusement que les insulteurs reçurent un châtiment immédiat. Deux élèves de la

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