II
Le Libérateur.
L’ile Rousse est en rumeur ; toute la population se presse sur la côte, curieuse et empressée. Ce mouvement est dû à l’arrivée de deux grands vaisseaux de guerre précédés d’un superbe brick, étroit, élancé, hardi qui doit courir sur les vagues comme un oiseau. Tout reste muet sur les trois bâtiments où flotte le pavillon anglais, mais le peuple du littoral á déjà fait leur légende. Le brick surtout qui porte un nom significatif : Le Libérateur est l’objet des suppositions et des affirmations les plus diverses.
On voit pourtant circuler à travers la foule quelques individus au regard louche, à l’air sombre et mécontent. C’est de ceux-là sans doute que vient une nouvelle rumeur qui tombe comme une glace sur le feu des espérances patriotiques.
— Bastia est tombée au pouvoir de Gênes ; les Corses qui n’ont pas été massacrés sont en fuite.
À ces nouvelles qui jettent dans le peuple un moment de consternation, un homme s’approche et questionne.
C’est un montagnard de haute stature, reconnaissable à sa veste brune et à ses épaisses
