Page:Bibaud - Histoire du Canada sous la domination française, Vol 1, 1837.djvu/273

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parmi ces peuples, la plupart, au dire de M.  Smith, auraient abandonné les Anglais, pour se joindre aux français.

Jusqu’à 1750, les Canadiens n’avaient pas eu sujet d’accuser leurs gouverneurs, ou leurs intendans, de péculat, de concussion, ni même d’une conduite sentant l’injustice ou la partialité, dans l’administration des affaires générales, et particulièrement des finances : mais au temps dont nous parlons, la corruption commença à se montrer à découvert chez la plupart des fonctionnaires publics de la colonie. Le marquis de la Jonquière, qui ne touchait pas moins de soixante mille livres, par an, d’appointemens et de pension, était d’une avarice sordide ; l’intendant Bigot ne se trouvait pas assez riche, ou pas assez payé, pour soutenir dignement le rang qu’il occupait ; et ils avaient l’un et l’autre des parens et des favoris à enrichir. Pour suppléer à ce qui leur manquait, ou à ce qu’ils croyaient leur manquer, du côté de la fortune, ils eurent recours, comme on l’a déja vu plus haut, à la traite avec les Sauvages, et ils la firent au moyen de sociétés, qu’ils formèrent, et où ils firent entrer leurs parens et leurs amis. Quelquefois, ils mirent en œuvre des moyens plus odieux encore : c’est ainsi, d’après M.  Smith, que pour enrichir Pean, son favori, M.  Bigot lui prêta une forte somme d’argent, prise dans le trésor public, pour acheter, à la campagne, du bled, qu’il racheta ensuite lui-même, pour le gouvernement, à un prix exhorbitant. Quelques uns de ces contrats avantageux, ajoute le même historien, enrichirent le favori, qui, à la recommandation de son protecteur, fut nommé major de Québec, et fait, quelques années après, chevalier de Saint-Louis.