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Page:Bibaud - Le secret de la marquise, Un homme d'honneur, 1906.djvu/5

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le secret de la marquise

lentement pour revenir au château, où depuis longtemps déjà la marquise de Montreuil, assise à sa fenêtre, les attendait avec impatience, pour faire servir le dîner, qui par leur faute se trouvait en retard, mais il importait bien à ces deux beaux jeunes gens que le repas fut manqué. Aux mille vibrations harmonieuses de la nature se mêlait dans leurs cœurs une douce musique qui chantait : « je t’aime », et oublieux de tout le reste, ils vinrent s’asseoir sur un banc d’osier au pied d’un grand chêne pour se redire encore ce que de tout âge les poëtes ont chanté.

La marquise de Montreuil en les voyant ainsi perdus dans ce monde de félicité, que les êtres seuls qui se sont compris ont trouvé, cacha sa tête dans ses mains, des larmes brûlantes inondèrent son visage. « Mon Dieu, mon Dieu, murmura-t-elle, d’une voix entrecoupée, n’ai-je donc pas assez souffert, ma faute doit-elle être expiée par le malheur de mes enfants ! Oh, non, non, faites-moi mourir ; mais ne les frappez pas, car ils sont innocents ! » Se jetant à genoux devant un grand tableau, appendu à la muraille, représentant un bel officier en uniforme, elle continua : — Charles, Charles ! Qu’avons-nous fait ? c’est horrible, c’est affreux ! je ne puis plus supporter tant d’angoisses. » Un cri de douleur s’échappa de sa poitrine, elle s’affaissa lourdement sur le sol, privée de connaissance.

Au bruit de sa chute, le maître de cérémonie, qui attendait les ordres de Madame de Montreuil, dans l’appartement voisin, entra précipitamment dans la salle, où il trouva la marquise presque sans vie. D’un vigoureux coup de sonnette il appela la femme de chambre à l’aide de sa maî-