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un homme d’honneur

un moment donné ce grand capitaliste disparaissait, emportant avec lui tout l’argent versé dans la caisse, l’on divisait ensuite. L’agent criait à tout venant qu’il avait été joué, qu’il était de bonne foi en confiant à Dubois les sommes placées chez lui, qu’on ne pouvait lui faire un crime de s’être trompé. Si les dupes s’avisaient de plaider, c’était pour perdre davantage, le filou ayant filé sans laisser de traces, aucune preuve suffisante ne pouvait être apportée contre le rusé renard qui le premier avait crié au voleur. Dubois s’établissait dans une autre partie du continent, puis, sous un nouveau nom, continuait ses opérations frauduleuses.

Vous rappelez-vous de la poursuite de Madame Daulac contre Martineau ? Il paraît que le jeune avocat qui plaidait pour ce dernier était un honnête homme, il a eu des remords d’avoir gagné cette cause, et s’était juré que si l’on avait surpris sa bonne foi il ferait remettre à la famille dépouillée ce qui lui appartenait.

— Ah ! ah ! ah ! Il n’y en a pas beaucoup de son espèce. C’est la première fois que nous entendons dire qu’un avocat regrette d’avoir gagné une cause, bonne ou mauvaise.

— Eh bien ! je vous le répète, c’est un honnête homme ce Paul Bienville. Il ne s’est donné aucune paix, aucun repos avant d’avoir mis le grappin sur les drôles qui s’étaient moqués de lui. Il s’était dit qu’une profession n’est noble, belle, que du moment où elle a pour but le triomphe du bon droit. Pour lui, gagner une cause injuste était une injustice. Aujourd’hui les journaux américains font un éloge mérité de sa conduite désintéressée, car il n’a pas hésité à mettre tout