Page:Bibaud - Les fiancés de St-Eustache, 1910.djvu/26

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
18
LES FIANCÉS DE ST-EUSTACHE

elle a été aimée bien souvent, on a sollicité sa main, elle est restée indifférente à ses admirateurs, la richesse, les belles positions, elle les a refusées, ne pouvant donner son cœur à ceux qui voulaient l’épouser, elle a préféré rester seule, sans fortune, mais franche et libre, étant incapable d’accepter une affection sincère sans la partager.

Elle pose sur sa tête son élégant chapeau, encore de sa confection, puis donc, les gants de soie. Ainsi elle est parfaite. Légère et fraîche comme un jour de printemps elle sort, comptant sur un heureux hasard pour rencontrer celui qui occupe sa pensée. Le voilà, elle le voit de bien loin, il s’arrête, cause avec elle, jamais il n’a été aussi aimable, il lui promet de passer la voir chez elle ; mais soudain ses regards se portent sur les mains de la jeune fille. Comment, si bien mise et des fenêtres aux doigts ! Un nuage passe sur son front, Alain est un homme rangé, d’une méticuleuse propreté, d’une particularité excessive, ayant une instinctive horreur des femmes sans ordre. Impressionnable, nerveux, il ne peut dissimuler, sa conversation change, il devient plein de réticences, comme un portier de séminaire, puis soudain saluant, il la quitte. Étrange, c’est étrange, se dit la jeune fille, quelque chose de mystérieux s’est glissé entre elle et lui, il n’était plus le même qu’est-ce donc ? En arrivant