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Page:Bibaud - Lionel Duvernoy, 1912.djvu/66

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vouait ne pas m’aimer et désirait que nous demeurassions étrangers l’un pour l’autre. Oh ! Léa, tu ne peux savoir quelle fut ma douleur. Ce nom que je m’étais habituée à aimer, je me mis à le détester et résolus de ne jamais le porter.

Mon père était mort, je ne craignais pas de l’offenser en renonçant à ce titre de baronne pour lequel son orgueil m’avait sacrifiée. En proie au désespoir, seule au monde à dix-huit ans, je vins chercher consolation auprès de ma cousine, Madame de Treslin, l’unique parente qui me restât. Elle se moqua de moi, de mon chagrin, me disant que j’étais une petite folle, que mon mari avait beaucoup de charité de me délivrer de sa présence, tous les hommes étant des embarras l’on devait bénir le ciel lorsqu’ils s’éloignaient. Puis, en m’embrassant, elle ajouta :

— « Ma chère petite, le baron est un niais de ne savoir apprécier une charmante enfant telle que vous, il faut donc se réjouir de son absence. Vous êtes beaucoup trop jeune et trop jolie pour gâter votre visage avec ces vilaines larmes. Venez demeurer avec moi et jouissez de la vie, à la jeunesse il faut le plaisir. Je n’ai pas d’enfant, c’est moi qui me charge de votre entrée dans le monde. Le titre de baronne vous déplaît changez-le pour celui de votre terre de Soulanges. Vous êtes libre, votre