Page:Bibliothèque de l’École des chartes - 1895 - tome 56.djvu/108

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mil cinq cens, neuf moins, plus non,
Douze en septembre, en grant renom,
Servant dame qui Royne est dite,

Par Atropos, qui humains croche
Et qui tout preux de son dard broche,
Fut ce noble homme à mort brochié.
De vertus n’estoit decrochié ;
Donc dire en doibt : Soubs ceste roche
Vertueux gist[1].


C’est le neuvième vers de cette pièce qui nous donne l’année de la mort de Meschinot ; mais, pour l’y trouver, il faut bien lire.

Et d’abord on lut fort mal. On lut tout d’une venue Mil cinq cens neuf, et sans s’inquiéter de la fin du vers, on mit résolument la mort de Meschinot en 1509. Telle est l’opinion de tous les anciens auteurs, Niceron, Goujet, Kerdanet, Levot lui-même, dans une première notice sur notre poète donnée par lui en 1843 à la Biographie universelle de Michaud[2]. C’est pourtant en cette même année 1843 que la bonne lecture, la vraie interprétation de ce vers fut découverte et signalée, non pas par Levot qui sembla s’en faire honneur plus tard[3], mais par Brunet dans la 4e édition de son Manuel (t. III, p. 370).

En tête de son article Meschinot, Brunet avait reproduit dans son texte le titre de la 1re édition donnée en 1493 par Étienne Larcher, titre qui porte :


Cy commence le livre appelle les Lunettes || des princes, avecques aulcunes balades de y plusieurs matières composées par feu Jehan || Meschinot, seigneur des Mortiers, escuyer, en || son vivant principal maistre d’hostel de la || duchesse de Bretaigne, à présent royne de France.


Si Meschinot ne vivait plus en 1493, impossible à lui d’être mort une seconde fois en 1509. Pour concilier l’épitaphe de l’édi-

  1. Je n’ai pas sous la main l’édition de Le Caron ; je donne cette pièce d’après la double réimpression de Niceron (Mém. des hommes illustres, XXXVI, p. 358) et de Goujet (Bibl. françoise, IX, 407), dont le texte est identique.
  2. Supplément, t. LXXIII, p. 512-514.
  3. En 1857, dans la Biographie bretonne (II, 469), Levot donne cette opinion comme s’il l’eût toujours professée et sans en rapporter l’honneur à Brunet, ainsi que l’a très justement remarqué M. Trévédy.