Page:Bibliothèque de l’École des chartes - 1895 - tome 56.djvu/422

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il était le doyen de nos archivistes : mais depuis longtemps déjà il était au premier rang de ceux que l’on savait absolument dignes d’être associés officiellement à la direction d’une section, et, s’il n’avait pas encore été promu à un grade supérieur, c’est que les limites de nos cadres ne l’avaient pas permis.

« Pierre Bonnassieux, qui, né le 2 mai 1850, devait atteindre sa quarante-cinquième année la veille même de sa mort, s’était engagé dans un bataillon de chasseurs au début de la guerre de 1870. Ayant repris en 1871 ses études, tant à l’École des chartes qu’à l’École de droit, il était sorti de la première École, le 23 janvier 1873, avec le diplôme d’archiviste paléographe, et de la seconde, vers la même époque, avec celui de licencié. Il acceptait, quelques mois plus tard, la direction du cabinet d’un préfet, qu’il accompagna dans l’Ariège et dans la Nièvre. Lorsqu’il entra aux Archives nationales, il n’eut pas à regretter de s’être détourné, pendant près de deux années, de la carrière que lui ouvrait l’École des chartes. Son active participation aux travaux d’une préfecture l’avait très heureusement préparé à ceux qui devaient lui incomber aux Archives, où il avait été nommé auxiliaire surnuméraire en novembre 1874 et prenait place, en juin 1876, parmi les archivistes titulaires de la section administrative. Attaché à la plus considérable de nos séries, celle qui, renfermant les fonds de l’administration générale de la France, s’accroit chaque jour des apports des ministères, il savait distinguer rapidement les uns des autres les documents disparates que trop souvent l’on assemble dans les versements, et sans peine il introduisait l’ordre parmi les dossiers comme dans les répertoires.

« Combien nous était précieuse la parfaite connaissance que Bonnassieux avait acquise de l’ensemble et des détails de la complexe et vaste série F ! Il y a peu d’instants, après avoir lu ses premiers rapports, qui témoignent de l’ardeur et de l’intelligence avec lesquelles il s’employait dès 1875 au classement de cette série, je cherchais, sans y réussir, des éclaircissements que peut-être il eût pu seul fournir sur l’état ancien de quelques subdivisions et sur les modifications qu’elles ont subies ; déjà, au lendemain de sa mort, je regrettais de ne pouvoir plus faire appel à son expérience et à ses souvenirs. Ce sont nos entretiens, plutôt que ses très sommaires rapports d’autrefois, qui nous instruisaient de ses premiers travaux et qui nous apprenaient, par exemple, comment, plus curieux que ses prédécesseurs d’étudier tous les documents dont pouvait s’éclairer l’histoire de l’un des fonds du commencement de ce siècle, il avait su retrouver l’interprétation et l’usage d’anciens catalogues venus d’un ministère, qui tout d’abord avaient semblé trop énigmatiques pour qu’on en tirât profit ; mieux compris, ces inventaires ont rendu immédiatement accessible aux historiens des temps modernes une source abondante de renseignements.