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gence, avait gravement atteint son corps. Ce premier et sévère avertissement de la mort, qui semblait devoir l’inviter au repos, ne triompha pas de son activité. Dès que ses forces mal affermies le lui permirent, il revint, bien péniblement, à son bureau des Archives ; à ce coup douloureux il opposait, comme aux autres épreuves qui avaient traversé sa vie, la résignation d’un fervent chrétien et la patience d’un sage. Jamais ses amis, même les plus intimes, ne reçurent la confidence de ses plaintes. Là fut le côté vraiment grand de son caractère et qui mit, dans sa vie morale, une remarquable unité. Ceux qui l’ont connu pendant les années pleines d’espérances de la jeunesse, dans l’âge mûr et jusqu’à la mort, l’ont toujours vu le même : immuable dans ses croyances, courageux et doux à la fois devant les difficultés, infatigable à travailler.

« Il fut frappé la nuit, pendant son sommeil. Sans doute, il ne vit pas la mort venir. Elle ne l’aurait pas effrayé ; il l’attendait. Pendant cette cruelle et dernière année, il l’avait plus d’une fois appelée, comme la grande libératrice, comme l’amie suprême qui devait couronner ses hautes espérances. À celui qui, jusqu’à la fin, fut pour lui le plus fidèle et le plus chaud des amis, il disait souvent : « J’aurais dû mourir après ma première attaque ; j’étais si bien préparé ! J’ai manqué le coche. »

« Non, cher confrère, vous n’avez pas manqué le coche ; une année de souffrance et de résignation compte pour l’éternité ! »


RÉORGANISATION DU SERVICE DES ARCHIVES.


RAPPORT DU MINISTRE ET DÉCRET.


« Paris, le 22 février 1897.


« Monsieur le Président,

« L’ancien régime avait vainement tenté, dans un intérêt administratif, de centraliser les archives de l’État. À Paris et à Versailles elles se trouvaient encore, en 1789, réparties dans des dépôts multiples ; il avait fallu en déverser le trop-plein dans des maisons religieuses dont on avait loué, sous Louis XV, des salles conventuelles désertées par les moines. Quant à essayer une centralisation pour répondre à un intérêt scientifique, cela semblait plus difficile encore. Les documents pouvant servir à l’histoire étaient dispersés en des milliers d’établissements seigneuriaux, ecclésiastiques, corporatifs sur lesquels le gouvernement n’avait aucune autorité. Une tentative en ce sens avait pourtant été faite sous l’impulsion d’un ministre qui, avec le goût de l’érudition, avait eu la bonne fortune de rencontrer un collaborateur aussi zélé que compétent ; mais, bien que secondé par la bonne volonté