Page:Bibliothèque de l’École des chartes - 1897 - tome 58.djvu/512

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dition. Le texte est éclairci par des figures techniques bien choisies, et le cadre restreint adopté par l’auteur, la seule époque de Philippe-Auguste, lui permet d’apporter une précision particulière dans l’étude des monuments dont il est difficile de donner une idée plus juste et plus complète. L’Académie française lui décerna pour cet ouvrage le grand prix Gobert. — Peu de savants ont reçu de l’Institut, avant de lui appartenir, d’aussi éclatantes marques de sympathie, tant de témoignages d’estime !

« Je ne puis énumérer ici tous les titres qu’il s’était acquis à la bienveillance de notre Académie, par ses recherches incessantes et par ses beaux travaux. J’ai rappelé les principaux. Il fut élu le 18 février 1887 à la place laissée vacante par le décès de Natalis de Wailly, qui l’avait désigné lui-même à vos suffrages, et dont la recommandation émue fut comme le testament académique de l’un des hommes qui ont le plus honoré notre Compagnie.

« Il me resterait à dire un mot de ses travaux paléographiques. Il me semble qu’ils peuvent être confondus avec son enseignement. Pendant plus de vingt-cinq ans, il a été titulaire du cours de paléographie à l’École des chartes, et il s’y est montré tout à la fois érudit et éloquent. Il avait la passion du professorat ; il possédait un don particulier pour conquérir l’affection de ses élèves. Par son entrain, par sa verve, par son dévouement, il les empêchait de se décourager. Que de jeunes gens, rebutés tout d’abord par les premières difficultés de la paléographie, ont été ainsi soutenus par sa parole d’apôtre, et, entraînés par la chaleur et par la conviction de leur maître, ont continué des études dans lesquelles ils sont devenus des maîtres à leur tour ! Il leur communiquait son enthousiasme pour la littérature du moyen âge ; il savait les initier d’une façon vive et agréable à des travaux nouveaux pour eux et absolument ardus. Je ne crains pas d’affirmer que Léon Gautier est un des hommes qui ont le plus contribué à former des paléographes et des érudits.

« Il a pris rarement la parole au milieu de nous. À voir l’attitude tranquille et recueillie qu’il conservait pendant nos séances, qui aurait pu deviner l’éloquence passionnée dont il était doué et dont il savait se servir d’une manière si profitable dans son enseignement ? Son cœur débordait de bonté, de tendresse et de chaleur ; on le sentait au ton vibrant de sa voix ; on le lisait dans ses yeux ; on le devinait dans la façon dont il parlait de ce qui lui était cher. Pendant toute sa vie, il a hautement affirmé ses sentiments religieux ; il revendiquait avec orgueil les titres que lui avaient valus ses écrits pour la défense de la foi catholique. Mais sa religion n’était pas intolérante ; ses amitiés et ses admirations en sont la preuve.

« Il meurt en pleine possession de son talent, travaillant toujours, au moment même où il venait d’achever un nouveau livre, complément