« Il n’est pas de miracle en mon pouvoir, » avait répondu saint François de Paule au roi Louis XI, qui se traînait à genoux devant lui et le suppliait de « faire alonger sa vie[1]. » Mourir ! oncques homme ne craignait plus la mort que le sombre châtelain du Plessis-lèz-Tours, surtout depuis qu’il l’avait frôlée en mars 1481 dans une attaque de « percusion » apoplectique. Pour corriger l’âcreté de son sang, il recourait à « de terribles et merveilleuses médecines[2], » du sang d’enfant, murmurait la légende. Du sang ? oui, mais de quoi, c’est ce que nous allons voir.
Le 8 juillet 1483, il donnait mille écus au capitaine de ses nefs[3], Georges le Grec, et, en hâte, l’envoyait « en l’Isle-Vert et pays de Barbarie[4] » quérir « aucunes choses qui touchoient très fort le bien et santé de sa personne[5]. » Deux navires et une barque, mis aux ordres du capitaine, embarquèrent à Honfleur[6] trois
- ↑ Acta Sanctorum, 2 avril, p. 150. — Commynes, éd. Dupont, t. II, p. 231.
- ↑ Jean de Roye, Chronique scandaleuse, éd. Bernard de Mandrot, t. II, p. 138. — A. Chereau, Jacques Coitier, médecin de Louis XI. Poligny, p. 18.
- ↑ Mémoriaux de la Chambre des comtes, t. II. (Arch. nat., PP 110, fol. 260.)
- ↑ Généalogie des Bissipat au xvie siècle. (Ms. fr. 30927, pièece 228.) G. le Grec emmenait pages et cuisiniers.
- ↑ Troisième compte de Jean Lallemant, receveur général des finances de Normandie, en 1483. (Ms. fr. 23266, pièce 33, orig. ; ms. fr. 20685, pièce 737, copie. Publié par moi dans les Navigations françaises au xve siècle, extrait du Bulletin de géographie historique et descriptive, 1895, p. 7.) Les villes normandes versèrent 10,000 livres pour les frais de l’expédition. — Il ne peut être question, parmi ces remèdes, du sang-dragon, produit des Canaries, dont les vertus astringentes, fort appréciées au moyen âge (cf. un compte de 1468, ms. fr. 26092, pièce 764), ne pouvaient convenir à un vieillard constipé et atteint d’hémorroïdes.
- ↑ Les navires jaugeaient sept à huit [cents] tonnes, comme on le voit par un
