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Abbeville[1], Nogent-les-Vierges[2], Saint-Valery-en-Caux[3], etc., sont obligées de demander au roi l’autorisation d’agrandir leurs cimetières ou d’en ouvrir de nouveaux, les anciens ne pouvant plus suffire. À Lille, on enterre les cadavres la nuit, hors la ville[4]. À Paris, vers le carême de 1349 (n. st.), on est obligé de fermer le cimetière des Innocents[5] et d’ouvrir un nouveau cimetière hors des murs, dans un terrain cédé par l’abbaye d’Hermières[6]. Au reste, nous pouvons montrer par des chiffres authentiques de quelle étendue fut en certains endroits la diminution de la population. Ainsi, nous voyons, à Paris, le nombre des Filles-Dieu tomber pendant l’été 1349, c’est-à-dire de Pâques à la Saint-Remi, de cent deux à quarante ; ce qui représente une disparition de plus de la moitié[7].

En présence d’une telle épidémie, le roi ordonna aux médecins de la Faculté de Paris de rédiger une consultation sur les moyens de la combattre, et des mesures furent prises pour l’enrayer[8]. Mais à cette époque où la foi était encore si vive, on ne se contenta pas des ressources que pouvait offrir la science humaine ne disposant alors que de bien faibles moyens ; on eut recours aux prières[9]. Or, dans la religion catholique, la plus sublime

  1. Lettres du 19 septembre 1349 (Arch. nat., JJ. 68, no  374).
  2. Oise. Lettres du 21 septembre 1349 (Arch. nat., JJ. 68, no  381 et 386).
  3. Seine-Inférieure. Lettres du 13 mai 1349 (Arch. nat., JJ. 77, no  298). Voy. encore : Arch. nat., JJ. 79A, no  30 (octobre 1348), no  48. JJ. 77, no  411 (mai 1349). JJ. 78, no  264 (juin 1349) et no  231 (14 mai 1350), d’autres lettres pour d’autres localités.
  4. Arch. mun. de Lille, compte de 1350, fol. 14 et 23 vo.
  5. Arch. nat., S. 28, no  3.
  6. Le Grand, les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris au milieu du XIVe siècle, Introduction, p. XIII (Extrait des Mémoires de la Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, t. XXV, p. 59.)
  7. J. Viard, Journaux du trésor de Philippe VI de Valois, no  3796, et D. Félibien, Histoire de Paris, preuves, t. I, p. 116 et 117. Voy. en particulier, sur la diminution de la population causée en France par la peste noire, le P. H. Denifle, la Désolation des églises, monastères et hôpitaux en France pendant la guerre de Cent ans, t. II, 1re partie, p. 57 à 63, où il trace un bon tableau des ravages causés par cette épidémie dans notre pays et donne des chiffres intéressants au sujet de la mortalité.
  8. Voy. L.-A.-J. Michon, Documents inédits sur la grande peste de 1348, Paris, Baillière, 1860, in-8o, et Rébouis, Étude historique sur la peste, 1888, in-12.
  9. Voy. Gallia Christiana, t. XVI, col. 574 et 575, mention de prières dites dans le diocèse de Viviers à cette occasion.