Page:Binet - L’étude expérimentale de l’intelligence.djvu/72

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tent d’ordinaire à des objets faisant partie d’un même tout, appartement, jardin et rue ; c’est encore de la contiguïté dans l’espace. Celle-ci domine donc les associations d’idées de Marguerite. Je trouve que ce mode de formation des idées est exclusif de l’imprévu et de l’originalité ; et on le comprend du reste, puisque l’association par contiguïté est essentiellement une force conservatrice ; elle restaure les états de conscience anciens, dans l’ordre où ils se sont déjà présentés, et n’y ajoute rien.

Si, en outre, on se rappelle que Wundt a nommé ces associations-là des associations externes, par opposition aux associations par ressemblance, qu’il désigne sous le nom d’associations internes, on comprendra qu’il est tout naturel de rencontrer beaucoup d’associations externes dans l’idéation de Marguerite, qui appartient si franchement au type observateur.

L’idéation d’Armande étant, comme nature d’images, plus variée que celle de Marguerite, on doit s’attendre à ce que les associations qui fonctionnent chez elle soient aussi plus variées. Les documents que j’ai entre les mains me permettraient de faire cette étude d’une manière complète ; Armande s’est expliquée sur ses associations pour les 300 mots qu’elle a écrits.

Mais je pense que, comme il s’agit ici simplement de comparer deux sujets, ce sera suffisant de prendre une série de 60 mots d’Armande et de les dépouiller. J’ai déjà dit que la moitié de ses associations restent inconscientes.

Un autre trait de son idéation est l’absence complète ou presque complète d’associations par contiguïté dans l’espace.

Lorsqu’Armande évoque un souvenir, ce souvenir ne fournit pas plusieurs mots ; il s’épuise en un mot unique, et aussitôt après il y a un changement dans la direction de la pensée ; aussi ne trouve-t-on pas dans les séries qu’elle écrit plusieurs mots qui font revivre des parties