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DISCOURS DE LA VIE

Ista luit portenta suo vel funere Selva
Castra sequens, vel tu febri defunctus inerte
Monstra procurasti. At magnis vertentibus annis
Centum signa dabit duri praenuntia luctus,
Atque tui in cœlum reditus pater Augur Apollo,
Nempe tuo assurgens sese Lyra contrahet astro,
Delitiasque lues invadet Apollinis omnes,
Nec soli exitium Lauro tunc afferet aetas
Sed tota lachrymans cum gente Hyacinthus abibit
In nihilum, funesta sibique a stirpe Cupressus
Desinet ablata humanis superare sepulchris :
Nec post se alterna poterunt reparare salute,
Materiemve unquam redigent formamque capessent.
Fracta exul Cythara incompti Pastoris avena
Mulcebit pecus, Admetum Phœbusque requiret :
Insultans terraeque novo cœlum incremento
Gestiet, illa situ in squallorem decolor ibit.

Il ne fut pas moins estimé du Roy qui est à present, duquel les tant heureuses victoires avoient servy de sujet à sa Muse *, que du feu Roy Charles, car le Roy[1], comme il a le jugement tresgrand et admirable, estimant toutes choses à leur juste valeur, le reçeut, l’oüit[2], l’ayma et le gratifia tousjours volontiers *. Mais | d’autant [20] que depuis douze ans les gouttes fort douloureuses l’avoient assailly, tellement qu’à grand peine pouvoit il faire la court, sinon à son lict * : voila[3] pourquoy ceste honneste privauté[4] qui se doit acquerir et continuer par une hantise ordinaire ne fut telle que souz le Roy Charles, encores que son merite le recommandast assez, et le rendist tousjours present en la memoire de nostre bon et sage Roy[5] *. Il

  1. B Charles. Car le Roy
  2. A loüit
  3. A son lict : Voila
  4. C modifie ainsi tout ce passage depuis la cit. lat. Il ne fut pas moins estimé du Roy Henry troisiesme à present regnant *, duquel les tant heureuses victoires avoyent servy de suject à sa Muse, que du feu Roy : mais non si familierement caressé : et s’en est plaint ouvertement, disant, plein d’humeur Françoise, qu’il vouloit que le Roy l’aimast, et pour preuve de l’amitié luy commandast, et en signe de bon service l’honorast et le gratifîast. Vray est que depuis douze ans les gouttes fort douloureuses l’avoient tellement assailly qu’il luy estoit presque impossible de faire [1609-1630 suivre] la court : joint qu’il n’avoit oncques esté de son naturel courtisan importun, et ne se pouvoit contraindre pour trouver [1604-1630 se trouver] aux heures des grands : Voila pourquoy ceste familiere privauté
  5. C sage Roy. Il fut tant admiré par la Royne d’Angleterre, qui lisoit ordinairement ses escrits, qu’elle les voulut comme comparer à un diamant d’excellente valeur qu’elle luy envoya *. De mesmes aussi ceste belle Royne d’Escosse, toute prisonniere qu’elle estoit, laquelle ne se pouvoit souler de lire ses vers sur tous autres, en recompense desquels et de ses louanges y parsemée [1604-1630 parsemées], l’an 1583 elle luy fit present d’un buffet de deux mil escus qu’elle luy envoya par le sieur de Nau son Secretaire *, avec une inscription sur un vase qui