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LES IDÉES MODERNES SUR LES ENFANTS

à chercher. C’est cependant là un jugement trop sommaire ; si on s’y tient, on ne va pas loin. Que de questions il reste à résoudre ! D’abord, quel est le degré de ce défaut d’intelligence ? Est-il grand ou petit ? S’il est grand, est-il d’une grandeur à désespérer l’éducateur ? Ensuite, est-il réel, ou bien apparent, ou du moins grossi, exagéré par des circonstances exceptionnelles ? Et encore en quoi consiste-t-il au juste ? Sur quelle fonction particulière, en quel genre de travail se manifeste-t-il le plus ? Et enfin quelles en sont les causes ? Et ces causes sont-elles de telle nature qu’on puisse les modifier ? Il est tout à fait nécessaire de se faire une idée sur ces divers points, de les raisonner, de les mettre au clair.

Nous croyons bon de commencer notre exposition en classant les différents cas qui se présentent en fait, dans la pratique de l’école, où l’on a le droit de suspecter une défaillance de l’intelligence chez un enfant. Notre énumération de ces cas ne sera pas exhaustive, mais nous en dirons assez pour mettre nos lecteurs en face de la complexité réelle des choses et pour leur donner l’impression de la réalité.

Voici d’abord un écolier qui, pour le moment, est comme désorienté. Il arrive d’une école de la campagne et on l’a placé dans une grande ville. Il y trouve des camarades qui n’ont pas les mêmes idées, les mêmes habitudes, le même langage ; les méthodes d’enseignement de la classe le surprennent. Le maître lui paraît un étranger, très distant, qui ne peut guère s’occuper spécialement de lui, car les élèves sont très nombreux. Ce changement brusque de milieu est une cause de désarroi pour un enfant, surtout s’il est encore très jeune et par conséquent inhabile à s’adapter. Nous avons souvent entendu dire que le seul changement d’école, même lorsque les deux écoles sont dans la même ville, produit pendant plusieurs