Page:Binet - Les Idées modernes sur les enfants.djvu/184

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
177
LA MÉMOIRE

procédés qui sont excellents : nous ne les citerons pas tous, mais trois seulement : 1o Le procédé qui consiste à faire apprendre par cœur pendant un temps déterminé d’avance, et à faire reproduire ensuite par l’élève tout ce qu’il se rappelle avoir appris pendant le temps d’étude. Ce procédé, remarquons-le bien, repose sur l’évocation volontaire des souvenirs ; l’élève évoque ce qu’il a appris, et c’est d’après la puissance de l’évocation qu’on juge le degré de la mémoire ; 2o Un autre procédé est dû à Ebbinghaus, dont il faut toujours citer le nom quand on parle de l’expérimentation sur la mémoire[1]. Ebbinghaus a montré qu’une leçon dont on ne peut plus évoquer un mot laisse cependant, quelquefois, une trace dans la mémoire ; et la preuve, c’est que pour l’apprendre à nouveau, on a moins besoin de temps que la première fois ; la différence de temps, ou économie de temps, donne le nom à cette méthode ; on l’appelle méthode d’économie ; et elle sert à se rendre compte de l’état des souvenirs et à les mesurer ; 3o Un dernier procédé consiste à faire reconnaître des souvenirs. Soit cent mots détachés, qu’on a lus publiquement dans une classe ; les élèves, après audition, ne peuvent en écrire de mémoire que dix à vingt ; si on leur montre les autres, confondus avec des mots différents, bien souvent ils les reconnaissent. La faculté de reconnaissance est bien plus large que celle de l’évocation. Le pouvoir de reconnaître est, a-t-on dit, le double du pouvoir de rappel. C’est rester encore au-dessous de la vérité.

Nous emploierons, pour la mesure pédagogique de la mémoire, le procédé de l’évocation volontaire, car c’est le plus complet de tous et le plus employé dans la vie.

Puisque nous nous proposons, par exemple, de

  1. Ueber das Gedächtniss, 1885, Leipzig. Voir aussi les deux importants mémoires de G.-L. Müller et F. Schumann, Zeitschrift für Psych. und Physiol. der Sinnesorgane, 1893, vol. VI.