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LES IDÉES MODERNES SUR LES ENFANTS

représenter. Très souvent aussi, si l’on insiste sur une question, ils pensent vous faire plaisir en répondant oui, et on obtient facilement, en changeant de ton, que quelque temps après ils répondent non. Il faut donc, à mon avis, ne pas faire grand fonds sur ces analyses d’introspection. Au lieu d’un témoignage suspect, on doit plutôt recourir à une expérience. Mais à laquelle ?

Les expériences recommandées par les auteurs pour démontrer les types de mémoire sont très nombreuses, parce qu’aucune n’est bien commode, ni bien sûre ; d’ordinaire on les recommande parce que, a priori, elles paraissent raisonnables, et le motif n’est pas suffisant. Il en est une pourtant qui nous paraît meilleure, plus logique, plus directe que les autres : elle consiste à éprouver la rapidité et la sûreté avec lesquelles un écolier enregistre les mêmes faits suivant qu’il se sert de la mémoire visuelle, ou auditive ou motrice. Cette constatation répond en effet très exactement à la préoccupation de la pédagogie. Voici le procédé qui a été souvent proposé, notamment par Biervliet. Le maître lira à deux ou trois reprises vingt-cinq mots à toute une classe et les élèves écriront aussitôt après de souvenir tout ce qu’ils se rappellent. Ensuite le maître leur présentera vingt-cinq autres mots, imprimés ou écrits sur le tableau noir ; les élèves auront un temps sensiblement égal au précédent pour les apprendre par cœur et de nouveau ils écriront tout ce qu’ils se rappellent. Après avoir fait alterner quatre ou cinq fois ces deux modes de présentation, on verra en corrigeant les copies si certains élèves retiennent mieux ce qu’ils ont vu et si d’autres élèves ont une préférence pour ce qu’ils ont entendu. Les premiers présenteraient vraisemblablement une prédominance de la mémoire visuelle, et les seconds une prédominance de la mémoire auditive. Il faudrait cependant, ajoutons-nous, qu’il fût reconnu que ces