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CHAPITRE VIII

La paresse et l’éducation morale.



I

la paresse


Lorsqu’un maître constate qu’un élève ne travaille pas autant que ses camarades, il se donne le plus souvent l’explication suivante : « Cet élève est un paresseux ; il pourrait faire beaucoup mieux s’il voulait, mais il ne veut pas. Il manque de volonté, c’est sa volonté qui est coupable ». J’ai entendu donner cette explication simpliste non seulement par de modestes instituteurs, mais encore par des maîtres éminents. Un professeur du Collège de France à qui je parlais un jour des différences mentales existant entre les écoliers et de l’intérêt qu’il y aurait à étudier ces différences, m’affirma d’un ton qui voulait être sans réplique que lorsqu’on a fait de l’enseignement, on est persuadé qu’il existe seulement deux catégories d’élèves : les travailleurs et les paresseux. J’eus beau lui suggérer que peut-être la question était moins simple, que la volonté n’est qu’une résultante, et qu’il faudrait analyser chaque cas avec soin, savoir pour quelle raison un élève ne travaille pas… il me répétait constamment, couvrant ma voix : « des travailleurs et des paresseux, il n’y a que ça ». Cette opinion