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Page:Binet - Les Idées modernes sur les enfants.djvu/320

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LA PARESSE ET L’ÉDUCATION MORALE

Les enfants sont malins ; ils ont bien vite fait de juger leur homme. En vain, un maître cherche à en simuler le caractère qu’il n’a pas ; j’en ai connu qui voulaient hausser le ton, frappaient comme des sourds sur leur pupitre et faisaient pleuvoir des pensums sur la classe ; ils nous étourdissaient pendant un temps et on vivait sous le régime de la terreur, mais bientôt la fausseté de cette autorité simulée était percée à jour ; on ne les craignait plus, et leurs punitions ne faisaient plus d’effet ; je les comparerais à ces médecins qui, malgré l’abus des ordonnances, n’arrivent pas à acquérir d’empire sur leurs malades. Tout autre est celui qui possède un caractère ferme ; il n’élève même pas la voix, il semble ne jamais s’occuper de discipline mais, quand il est là, tout le monde se tient bien, et, quand il parle, c’est le silence absolu. Quand l’occasion se présente, il rit, il plaisante ; il devient l’ami de ses élèves, il écoute leurs plaintes, il leur accorde la liberté de discuter contre lui ; rien n’altère son prestige. Signe particulier : il ne punit pour ainsi dire jamais. On l’a remarqué, l’autorité du maître se mesure au petit nombre de punitions dont il a besoin pour obtenir une discipline parfaite[1].

Les moyens éducatifs, dont nous disposons pour agir sur l’organisme de l’enfant, sont au nombre de trois principaux ; le plus souvent, on les combine ; mais, pour la description, il faut les distinguer. Ce sont :

1o L’abstention ;

2o Les moyens répressifs ;

3o Les moyens excitateurs.

1o L’abstention est presque une application du principe que l’on désigne, en économie politique, sous

  1. Un livre de Marion, L’Éducation dans l’Université, contient les remarques les plus fines sur l’autorité du Maître.