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Page:Binet - Les Idées modernes sur les enfants.djvu/80

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LE CORPS DE L’ENFANT

de deux catégories bien différentes ; les uns sont anatomiques, et se passent du concours de l’individu que l’écolier le veuille ou non, il suffit de le faire monter sur une bascule pour avoir son poids, et il ne peut rien pour le changer. Les autres procédés de mesure sont physiologiques ; ils supposent une fonction en activité, et, comme cette fonction est semi-volontaire, il se trouve que la mensuration qui en est faite porte, non seulement sur un état physiologique, mais encore sur un élément moral.

Quand quelqu’un presse le dynamomètre, le chiffre qu’il donne dépend de trois facteurs combinés :

1o La force de ses muscles, c’est-à-dire la structure, le volume, et l’état histologique de ses fibres musculaires ;

2o L’habileté et l’apprentissage ; la première fois qu’on prend l’instrument, on s’y adapte mal, on ne sait pas comment mettre les doigts, et, peu à peu, si on s’exerce, sans permettre toutefois que la fatigue intervenue, on obtient des chiffres de pression en ordre croissant. On a débuté par 32 kilogr. ; on recommence, sans se presser, et on amène 36 ; on se repose un peu, on reprend, on amène 40. Il n’y a qu’un naïf qui pourrait croire que cette croissance atteste uniquement une augmentation de force due à l’exercice. On a surtout augmenté d’adresse. C’est même là, soit dit en passant, une notion importante qu’on néglige trop souvent en pratique.

3o La volonté ; on veut plus ou moins serrer fort ; on aura plus de volonté, si on est intéressé, excité, ému, que si on est calme, indifférent, apathique, distrait, et, à l’appui, je citerai cet exemple joli faites serrer un jeune homme quand il est seul, puis faites-le serrer devant une jolie femme, on peut être certain que la seconde fois le chiffre est supérieur ; il l’est même sans que le sujet ait la conscience d’avoir donné un effort plus grand : c’est à son insu que sa force