Page:Binet - Les altérations de la personnalité.djvu/220

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Les expériences que nous venons de résumer ont été groupées sous le nom de mouvements inconscients, et, comme nous l’avons déjà dit, elles ont été expliquées le plus souvent par les propriétés motrices des représentations mentales. Il nous reste à montrer que cette interprétation, sans être absolument inexacte, est insuffisante, et que l’espèce de mimique inconsciente par laquelle une personne traduit dans certains cas une pensée interne ne peut s’expliquer que par des phénomènes de double conscience. Nous chercherons par conséquent à substituer aux théories communément admises, une théorie un peu différente, plus générale et plus compréhensive.

Le lecteur qui nous a suivi jusqu’ici a dû être frappé, et à plusieurs reprises, de l’analogie qui existe entre les mouvements dits inconscients des sujets sains et les réactions si variées des personnalités secondaires des hystériques. Tous ces phénomènes sont identiques au fond ; ils ne diffèrent que par le milieu, les circonstances extérieures ou le degré de développement. Prenons par exemple l’écriture automatique. On peut, comme le montre M. Gley, amener une personne normale à écrire le mot auquel elle pense ; sa main l’écrit sans le vouloir. Il en est de même pour l’hystérique, chez lequel l’écriture automatique est développée à tel point qu’il n’est besoin d’aucun dispositif spécial, d’aucun tour de main, pour l’observer. Or, nous avons vu en détail que cette écriture automatique de l’hystérique n’est point un phénomène isolé, sans lien avec le reste ; c’est une partie dans un ensemble ; c’est un des mille moyens par lesquels les personnalités secondaires affleurent et se manifestent ; et il existe des rapports multiples entre cette manifestation de la pluralité de conscience et les autres. Pourquoi n’en serait-il pas de même chez un individu normal ? Il est bien probable que chez lui aussi l’écriture automatique, étant de même ordre que chez les hystériques, fait partie d’un même ensemble de phénomènes, et remonte à une même cause primordiale, la désagrégation.