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et de ses enfants, dont l’avenir était toute sa pensée. J’ai maintenant entre les mains la dernière partie de sa correspondance avec sa femme, depuis leur entrée en Espagne jusqu’au 20 mai 1813. Toutes ses lettres annoncent un homme plein de sentiment et d’amour pour sa famille, de dévouement pour Napoléon ; et ce que beaucoup ignorent, un homme de goût, d’esprit, dictant une lettre avec un enjouement, une délicatesse, un laisser aller vraiment prodigieux, lorsqu’on songe qu’il écrivait sur l’affût des canons, au milieu des boulets et des balles, au bruit des remparts qui s’écroulent et des mines qui sautent.

Quelques passages donneront de ce que j’avance une plus juste idée que je ne pourrais en donner moi-même.


Ciudad-Rodrigo, le 11 juillet 1810.

« Troie est soumise ; mais les dieux ne permettent pas encore à Achille d’y faire venir son Iphigénie. Calchas prépare un sacrifice pour rendre les vents favorables. Déjà nos vaisseaux sont prêts, et sur sa parole, ils se tournent vers Salamanca. Qu’avec transport je parcourrai les chemins de la vieille Castille ! Je demanderai ma Laure à tout ce que je verrai ; mais non pas à tous ces vilains déguenillés qui ne la connaissent pas : je ne veux pas qu’il y en ait un qui la regarde ; ses vilains yeux souilleraient de leurs regards sinistres les traits de mon amie. »

Pernes, le 20 janvier 1811.

« Je m’empresse, ma chère Laure, de t’écrire moi-même pour te rassurer, et j’espère que cette lettre te parviendra avant que tu aies pu apprendre par une autre voie mon accident d’hier. J’ai été blessé au visage d’une balle qui, en me cassant le nez, est entrée dans la