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Page:Biographie des femmes auteurs contemporaines françaises.pdf/404

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sans liberté possible, devient le symbole mystérieux ; tout cela est d’un effet austère. Il y a donc un vrai mo¬ ment d’oubli, une trêve accordée, un refuge autre que le monde inconnu ; et ce bienfait, chaque nuit l’assure. Dors, pauvre être, retiens ton rêve s’il est doux, re- tiens-le s’il est amer ; aussi bien la réalité te serait trop souvent plus amère encore» Pourquoi t’éveiller, à moins que tu n*aies compris la vie par une foi sincère. Si tu t’es éclairé de cette lueur vivifiante, marche, mar¬ che ! Avance dans l’avenir avec le grand poëte d ’Orphée, avec le sage des Libres Méditations.

Que souvent on retrouve sa vie dans un effet de lu¬ mière, un nuage, un son, une odeur ! U y a tel espace étroit dans l’immensité de Paris, que je reconnais à l’explosion subite d’un mal qui sommeillait. La sensa¬ tion, comme une flèche ardente, a traversé mon âme avant que le souvenir me l’ait expliquée. « J’ai passé là, me dis-je, oui, j’ai souffert là.» Un pas de moins, je l’aurais ignoré, car j’ai peu la mémoire des lieux. Je regarde…. J’interroge des objets insignifiants pour tout autre ; et je m’assure que le sentiment ne m’a pas trom¬ pée. Il y a des rues que j’évite, qui m’inspirent un délire d’aversion.

Pourquoi, dans mes jours redoutés, le matin est-il sous l’influence mauvaise? Le matin a de si fraîches couleurs, il est si gaiement éclairé, si charmant d’har¬ monies I Et pour moi, misérable, le semoun du désert se lève le matin. C’est le matin que les noirs démons s’abattent dans mon âme et la remplissent de bruits fu¬ nèbres, de passions corrosives. La nuit, l’isolement, l’horreur inquiète, y descendent à leur tour. J’ai peur du temps qui va finir, du temps qui n’est pas encore, de la minute qui va passer ; ce qui m’effraie, je ne le sais pas, l’inconnu me possède. Le soleil, scion la parole