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1572, il massa secrètement ses hommes du côté du village de Leupeghem. Quelques-uns d’entre eux se mêlèrent à la foule qui se rendait à l’église de Pamele et s’emparèrent tout à coup du pont.

Dès ce moment la ville était prise. Mais il restait encore à s’emparer de la forteresse dite Château de Bourgogne, défendue par le courageux Courtewille, haut bailli d’Audenarde. Après une lutte sanglante, dans laquelle Courtewille fut tué, Blommaert parvint à se rendre maître aussi de la forteresse. Malheureusement pour le capitaine, après ce fait d’armes il ne sut plus dominer ses soldats : ils se livrèrent au pillage des églises, les couvents furent saccagés et cette déplorable dévastation, continuée dans les communes environnantes, s’étendit jusqu’à Renaix. Blommaert eut cependant assez d’énergie pour faire effectuer le dépôt d’une grande quantité de richesses enlevées par les pillards, afin de pouvoir les restituer.

Effrayée de ces désordres et craignant pour sa propre sécurité, la garnison de Deynze, renforcée de quelques troupes de Gand, se disposa à marcher sur Audenarde. Blommaert ordonna à Latouille de faire une reconnaissance de ce mouvement, mais Latouille fut repoussé. Un autre détachement, composé d’Espagnols, s’avança jusque sur le territoire de Bevere, aux portes d’Audenarde et prit possession du château de Brouwaen. Blommaert, laissant la garde de la ville à Ghuys, marcha à la rencontre des Espagnols, les défit et resta maître du château.

Sur ces entrefaites, le bruit se répandit que Malines, Termonde et d’autres villes étaient retombées aux mains des Espagnols et qu’un corps d’armée marchait sur Audenarde. Blommaert ne pouvant compter sur une force armée capable de résister à celle qui marchait à sa rencontre, quitta la ville avec ses plus chauds partisans, se dirigeant vers la Zélande. Poursuivi pour les Espagnols, il parvint jusqu’à Oostwinkel ; il s’y réfugia avec quelques hommes dans une grange ; mais ses ennemis, en nombre supérieur, ne pouvant le décider à se rendre, y mirent le feu. Blommaert et ses partisans, après une énergique défense, furent brûlés vifs. Ainsi périt cet enfant d’Audenarde, qui eut la gloire de mourir pour sa ville natale et pour la liberté de son pays.

Henry Raepsaet.

BLONDEAU (Jean-Baptiste-Antoine-Hyacinthe), jurisconsulte et publiciste éminent, naquit à Namur, dans la paroisse de Notre-Dame, le 20 août 1784, et mourut septuagénaire à Ermenonville (Oise), le 4 novembre 1854, dans la maison même qu’avait habitée J.-J. Rousseau. Ses parents, riches marchands tanneurs, eurent grand soin de son éducation. Il suivit d’abord les cours d’humanités du Collége de Namur, alors dirigé par des moines d’Oignies, successeurs des jésuites ; ensuite il se rendit à l’école centrale de Bruxelles et de là à celle d’Anvers, pour y étudier la philosophie et y puiser les premières notions des sciences juridiques. Ses succès furent tels qu’au commencement de 1802 il mérita d’être envoyé, comme élève d’élite du département des Deux-Nèthes, à l’Académie de législation, l’un des deux établissements privés qui, à cette époque, tenaient lieu d’école de droit dans la capitale de la France. L’année suivante, il donna la préférence à l’autre institution, dite Université de jurisprudence. Le 19 août 1805 (1 fructidor an XIII), chargé de lauriers scolaires, il soutint sa thèse de licence et prit bientôt après le titre d’avocat.

Cependant il ne parut pas au barreau, et ce fut peut-être prudence de sa part, dit un de ses biographes : « L’habileté de la mise en scène, le prestige de l’accent, les hasards de la parole improvisée, en un mot les qualités qui font la supériorité de l’avocat, manquaient au talent froid, contemplatif et presque mathématique de Blondeau. »

En revanche, l’élévation de son esprit et la profondeur de ses connaissances théoriques avaient fait présager pour lui, même avant qu’il eût terminé ses études, une renommée scientifique aussi durable qu’éclatante. Il s’était fait connaître et apprécier dans une conférence de droit qui le comptait parmi ses fondateurs, et dont les débats, à peine ouverts, avaient acquis une sorte de célébrité. Là se pro-