Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/27

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vées, il se fixa dans la même ville et y fut reçu, en 1585, dans la corporation de Saint-Luc, en qualité de fils de maître. En 1588, il épousa Élisabeth Goddelet. Parmi ses témoins, on remarque le peintre Jean Snellinck. Il ne paraît pas qu’il ait voyagé. Il était doué d’un talent assez remarquable et eût fait sans doute un artiste plus renommé si le goût ne lui avait point fait défaut; une imagination bizarre lui fit choisir de préférence les diableries, les représentations de sorcières, et, tendance plus fâcheuse, il introduisit ces singulières conceptions dans les sujets les plus sérieux. C’est ainsi que dans le tableau qu’on voit de lui au Musée de Bruxelles, et qui représente la Chute des Anges rebelles, les archanges, tout en précipitant dans l’enfer leurs confrères déchus, changent eux-mêmes de forme et en revêtent des plus étranges. Le Portement de croix, du Musée d’Anvers, montre une cavalcade des plus excentriques, avec les larrons sur une charrette, des paysans flamands revenant du marché et regardant passer le cortége, des cavaliers armés de toutes pièces et revêtus de costumes, empruntés pour la plupart au XVIe siècle. Ce tableau est signé P. Brueghel 1607. On comprend que de telles représentations ne soient pas agréables à l’œil et ne puissent plaire à un esprit sérieux. Cela n’empêche que le coloris du peintre ne soit digne de grands éloges : sa touche est fort légère et spirituelle et son dessin ferme et sûr. Pierre Breughel, le jeune, eut deux enfants; son fils, nommé Pierre comme lui, naquit en 1589 et fut reçu franc-maître de Saint-Luc, en 1608. Il fut peintre de portrait et eut, dit-on, un talent remarquable. On le considère comme le maître de Gonzalez Coques. Le second enfant de Pierre fut une fille appelée Marie et née en 1591. Notre peintre mourut en 1637-38, et sa femme ne lui survécut que d’un an à peu près. On cite plusieurs de ses élèves, parmi lesquels il y en eut un qui suffirait pour la gloire de son maître, nous voulons parler de François Snyders. Le portrait de Breughel est au nombre de la collection des Cent gravés par Van Dyck. Les principales galeries de l’Europe ont de ses tableaux. A Munich, l’Incendie de Sodome et l’Incendie de Troie, tous deux sur cuivre; le catalogue de ce musée le fait élève d’Égide Conin : ce nom de fantaisie doit signifier Gilles ou Égide van Coninxloo. A Berlin, une Bataille de paysans et une Marche au Calvaire; à Vienne, Adoration des Mages, Tentation de saint Antoine, etc.; à Dresde, l’Enfer, Tentation de saint Antoine et Ruine de Sodome; à Madrid, l’Enlèvement de Proserpine, la Tour de Babel, et deux Incendies; à la Haye, Jésus-Christ délivrant les âmes du Purgatoire; en outre, à Anvers et à Bruxelles, les tableaux déjà cités plus haut.

Ad. Siret.

BREUGHEL (Jean), dit de Velours, le vieux, fils aîné de Pierre, le vieux, peintre de fleurs, fruits, animaux et paysage avec figures, naquit à Bruxelles en 1568, un an seulement avant la mort de son père. Sa grand’mère maternelle, Marie Bessemers, veuve de Pierre Coucke, d’Alost, était peintre; c’est elle qui fit la première éducation artistique de l’enfant; elle lui apprit à dessiner et à peindre à la détrempe. Voyant les précoces dispositions de son petit-fils, elle le plaça ensuite chez Pierre Goetkint, ou Goekindt le vieux, afin qu’il y apprît à peindre à l’huile. Ce maître était marchand de tableaux, et n’a point laissé de traces dans l’histoire de l’art; il mourut en 1583, alors que Jean Breughel n’avait encore que quinze ans, et, par conséquent, il est certain que le jeune homme dut achever ses études dans un autre atelier. Cependant le nom de ce troisième maître n’est pas parvenu jusqu’à nous. Ses études étant finies, le premier soin de Breughel fut de partir pour visiter l’Italie et, selon plusieurs auteurs, l’Allemagne. Ainsi Descamps nous raconte qu’il alla d’abord à Cologne où ses tableaux, représentant alors exclusivement des fleurs et des fruits, eurent un immense succès. Ce qui rend vraisemblable son séjour dans plusieurs localités allemandes, c’est la faveur constante dont il fut l’objet de la part de plusieurs princes de ces pays, pour lesquels il exécuta une foule de compositions. L’épitaphe du maître, qui nous a été