Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/360

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délai de quatre mois; qu’après l’accomplissement de celui pour lequel il se serait prononcé, le roi restituerait toute la partie des États du duc de Savoie dont il s’était emparé, tant deçà que delà les monts. Ces conditions, on le voit, étaient celles que Charles avait mises en avant en 1540; on ne pouvait donc lui reprocher d’abuser de ses avantages; sa modération lui attira même le blâme de bien des gens, en Angleterre, aux Pays-Bas et en Espagne[1].

Le 19 septembre, Charles jure l’observation du traité en présence du duc d’Orléans, du duc de Vendôme et des plénipotentiaires français. La veille, l’amiral d’Annebault lui avait présenté le duc d’Orléans; il avait fait à ce jeune prince un accueil tout paternel[2]. Il quitte Crépy le 20, couche le 22 à Cateau-Cambrésis, d’où il va le lendemain voir la reine Marie à Cambrai, retourne le 24 à Cateau-Cambrésis pour licencier son armée, et rejoint Marie à Valenciennes le 28, s’étant arrêté quelques heures à Landrecies, qui venait de lui être restituée. Le 1er octobre il arrive à Bruxelles. Il reçoit dans cette capitale la visite de la reine Éléonore et celle du duc d’Orléans; il va au-devant de la reine de France jusqu’à une demi-lieue de Mons; Eléonore et le prince son beau-fils séjournent à Bruxelles du 22 octobre au 3 novembre; pendant ces deux semaines, les joûtes, les tournois, les jeux de cannes, les festins, les danses, les mascarades se succèdent sans interruption à la cour. Charles avait convoqué les états généraux; il les assemble dans son palais le 4 novembre. Il leur dit que, depuis leur dernière réunion, les états de Gueldre et de Zutphen, considérant le grand bien que leur réduction sous son obéissance leur a procuré, voyant aussi le soin qu’il a de maintenir leurs priviléges et de les gouverner avec justice, « comme est son intention en user envers tous ses sujets, » l’ont fait supplier de leur donner l’assurance, par un acte en forme, qu’ils ne seront jamais séparés des Pays-Bas. Il parle du traité que, dans l’intérêt de la navigation et du commerce de ces provinces, il a conclu avec le roi de Danemark, de l’aide qu’il a obtenue des états de l’Empire contre « les Turcs et ses autres ennemis. » Il passe très-légèrement sur sa campagne de France, se bornant à dire qu’il « s’est mis aux champs et a exploité la guerre comme les états ont pu l’entendre. » Il se réjouit de la conclusion de la paix qu’il a toujours désirée, et qui va donner à ses pays les moyens de se refaire des pertes, des dommages, des charges qu’ils ont eu à supporter. Il expose la nécessité où il est de se rendre dans la Germanie, afin de pourvoir, avec les états de l’Empire, tant au fait de la religion qu’à la guerre contre le Turc. Il exprime son regret que cette circonstance ne lui permette pas de se rendre dans toutes les provinces, comme il l’aurait voulu, et de leur témoigner en personne la satisfaction qu’il a de leurs services, desquels il gardera le souvenir, pour leur être toujours bon, gracieux et bénin prince. Il termine en les priant de vouloir, cette fois encore, montrer le zèle du bien public dont ils sont animés, en accordant à son gouvernement les moyens de payer les dettes de la dernière guerre[3]. Les documents que nous avons consultés sont muets sur la réponse faite à cette proposition par les états généraux : mais ils nous apprennent que les provinces avaient chargé leurs députés de féliciter l’empereur sur les succès qu’il avait eus en France et sur la paix qui en avait été le fruit.

En raison de sa population et de sa richesse, la Flandre était la province qui avait à fournir le plus fort contingent dans le subside demandé aux états généraux[4]; Charles, désirant complaire aux Flamands, part, pour Gand le 2 décembre. Il y était à peine de deux jours, que la goutte le prend. Les médecins conseillent son retour à Bruxelles, dont ils jugent que l’air lui convient mieux :

  1. Trois années de l’histoire de Charles-Quint, pp. 63-64.
  2. Trois années de l’histoire de Charles-Quint, p. 61.
  3. Recueil manuscrit des propositions faites aux états généraux.
  4. Il était de 240,000 florins : celui du Brabant de 200,000, de la Hollande de 100,000, du Hainaut de 40,000, etc.